lundi 21 mars 2016

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Patrimoine : les pièges à éviter quand on est en couple - Challenges.fr



Communauté ou séparation de biens ? Comme en témoignent de récentes modifications de textes par Bercy, chaque régime matrimonial cache des pièges. Voici comment les éviter.

Article de  pour Challenges
Elle embarrassait assureurs et assurés depuis 2010 : la réponse ministérielle Bacquet a été annulée le 12 janvier. Le texte tirait les conséquences fiscales d’un principe : dans un couple marié sous le régime légal, un contrat d’assurance- vie, même souscrit au nom d’un seul époux, est commun. Résultat : lorsque le conjoint non-souscripteur mourait, la moitié de la valeur du contrat était intégrée à la succession… et se retrouvait taxée comme de classiques liquidités. Brèche gênante dans l’image de havre fiscal de l’assurance-vie. Or après des mois de lobbying, la doctrine dite « Bacquet » a fini par être supprimée. Depuis le 1er janvier, les sommes revenant aux héritiers de l’époux non-souscripteur bénéficient à nouveau de la fiscalité privilégiée de l’assurance-vie. En principe, du moins, car le texte des services fiscaux est suffisamment flou pour susciter déjà de nouvelles questions…

L’affaire Bacquet le confirme, dans un couple, il n’est pas toujours simple de savoir précisément ce qui est à l’un et ce qui est à l’autre. Beaucoup ne le comprennent qu’à l’occasion d’un divorce, et souvent à leurs dépens. Sur le papier, pourtant, tout paraît si simple… Avec le régime de la communauté légale (contrat par défaut), tous les biens acquis par un couple à compter de son mariage (y compris l’épargne constituée avec les salaires) sont communs, sauf ceux reçus en donation ou en succession, qui restent propres. Au contraire, avec le régime de la séparation de biens, tout est séparé et reste séparé… Avec les pacs conclus avant le 1er janvier 2007, les partenaires sont en indivision : les biens acquis en commun sont réputés appartenir pour moitié à chacun d’eux. Les pacs signés après le 1erjanvier 2007, eux, sont proches du régime séparatiste. En réalité, il y a plusieurs pièges qu’il faut savoir éviter.

Piège n° 1 : la maison

Les époux croient souvent qu’en cas de divorce, chacun récupérera sa mise. Même avec un régime séparatiste, les choses sont loin d’être si simples. « La quote-part de financement des époux peut être différente de ce qui est mentionné dans l’acte d’achat, explique Delphine Pasquier, responsable de l’ingénierie patrimoniale de Bred Banque privée. Mais la jurisprudence récente l’affirme : si l’un a payé davantage, il n’a aucune créance contre son conjoint, car ses règlements participent à son obligation de contribuer aux charges du mariage. »

Les conséquences : l’un enrichit l’autre sans le vouloir… En communauté de biens, si rien n’est écrit, un bien propre enrichit un bien commun, ou, au contraire, des fonds communs valorisent un bien propre. Ainsi, une maison construite à deux, sur le terrain donné par les parents de monsieur est la propriété de monsieur. Même chose si les deux époux rachètent 80 % des parts d’une maison familiale dont le mari détient 20 % : il reste le propriétaire de 100 % de la maison ! Bien sûr, au moment de la liquidation du régime (divorce ou décès), il devra rembourser à la communauté les investissements et leur plus-value. Cela s’appelle une récompense : l’époux qui n’est pas propriétaire doit récupérer sa mise. « Mais au moment d’un divorce, il est toujours plus simple d’être propriétaire que créancier », rappelle Vincent Chauveau, notaire à Nantes.

La parade : dans un régime séparatiste, se tenir strictement aux parts de financement mentionnées dans l’acte. Dans un régime communautaire, déclarer l’origine des fonds propres. Pour Delphine Pasquier, de la Bred, il faut « déconseiller les transferts de biens propres vers des biens communs. Mieux vaut, si cela est possible, recourir à l’emprunt ».

Piège n° 2 : l’assurance-vie

« C’est le sujet sur lequel nous observons le plus d’incompréhensions », reconnaît Sébastien Granvillain, ingénieur patrimonial à la Banque Palatine. Par exemple, lorsque l’on est marié sous le régime de la communauté, il est dangereux pour un conjoint de déposer, pendant le mariage, son épargne propre dans un contrat d’assurance-vie. « S’il n’est pas précisé à la souscription que les fonds versés sont des biens propres, ils seront considérés comme communs », alerte Sébastien Granvillain. Plus fréquent encore : ignorer les conséquences de la communauté réduite aux acquêts… et souscrire un contrat à son nom, y placer des fonds communs sans savoir que le conjoint aura alors automatiquement des droits sur la moitié de la valeur du contrat (arrêt Praslicka et réponse ministérielle Proriol).

Les conséquences : en cas de divorce ou décès du non-souscripteur, le titulaire du contrat doit verser la moitié des sommes à son ex-conjoint ou à ses héritiers. Logique si ce sont des fonds communs, irritant si ce sont des sommes issues de donations ou successions familiales.

La parade: toujours préciser, lors de la souscription du contrat, que l’on verse des fonds propres et justifier de leur origine (cela s’appelle une clause de remploi). « Avec les fonds communs, pour éviter les calculs en cas de divorce, je préconise deux contrats, chacun au nom d’un époux, alimentés de façon strictement identique », reprend Sébastien Granvillain.

Piège n° 3 : l’entreprise

Attention, le fait qu’une société porte le nom de l’un ou l’autre des époux ne lui confère pas de caractère propre. « Si le régime matrimonial est la communauté réduite aux acquêts et que la société est créée après le mariage, la valeur patrimoniale est commune », explique maître Vincent Chauveau. Sur le plan légal, un des époux peut avoir le titre (associé, par exemple), mais son époux/épouse a droit à la moitié de la valeur des actions ! Idem en cas d’augmentation de capital pendant le mariage. Plus ennuyeux encore, pour certaines activités exercées en nom propre, ou dans les sociétés à responsabilité illimitée, les dettes professionnelles de l’un des époux engagent tous les biens de la communauté.

Les conséquences : un divorce, et madame doit à son mari 50 % de la valeur de la société qu’elle a créée et développée. Autre situation : si l’entreprise a des difficultés, les biens communs du couple peuvent être saisis pour éponger les dettes.

La parade : la séparation de biens ! C’est la meilleure protection face aux créanciers de l’autre. A défaut, les entrepreneurs individuels peuvent faire une déclaration d’insaisissabilité chez leur notaire, avant de contracter des emprunts. Sinon, il est aussi possible de créer la société avec des fonds personnels, c’est-à-dire issus de donations ou successions… bien traçables.

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