Article de Philippe MERCIER pour l'Est Républicain
L’intrusion d’un compteur « espion » dans la sphère privée suscite des résistances. Et les commentaires acerbes de l’ADC 54 de Guy Grandgirard.
Les courriers arrivent par centaines dans les boîtes aux lettres. Du moins chez ceux dont le compteur électrique est à l’intérieur de l’habitation. Parce qu’ERDF fait souvent l’impasse sur la lettre d’information, quand le compteur est à l’extérieur. Linky est alors installé sans crier gare.
Ce compteur « espion », relève toutes les dix minutes votre consommation globale, et l’envoie une fois par 24 h à votre fournisseur d’énergie. Son arrivée provoque chez de nombreux Nancéiens un profond sentiment de rejet.
« On nous trace déjà avec nos téléphones portables, nos cartes de paiement. Le principe est le même avec le compteur Linky. Mais l’arrivée de Linky suscite des réactions qu’on n’a pas vues avec les téléphones ou les cartes de paiement. Car Linky pénètre dans la sphère privée de l’habitation. C’est vécu comme une intrusion, un traumatisme », commente Guy Grandgirard, président de l’ADC 54, association de défense des consommateurs lorrains.
« Avec Linky, les gens touchent du doigt les mutations profondes de notre société interconnectée 24 h sur 24. Sont-ils prêts à les accepter ? » Guy Grandgirard se garde de répondre à la question, mais soulève quantité d’interrogations d’ordre technique sur le fameux compteur.
Juridiquement impossible de refuser
« La commission informatique et liberté a d’abord émis des réserves sur la transmission des données de consommation. La CNIL estime maintenant qu’ERDF garantit l’anonymat. Et ERDF nous dit que les données sont sécurisées. Certes, mais jusqu’où ? Jusqu’à tant qu’on découvre qu’elles ont été pillées ? » proteste Guy Grandgirard.
Le président d’ADC 54 confirme que les particuliers ne peuvent pas s’opposer juridiquement à la pose de ces compteurs à leur domicile. Articles de loi et décréts vérouillent soigneusement toute possibilité de contestation.
En revanche, « il existe un débat contradictoire sur la dangerosité de la technologie utilisée. Les avis sont partagés… », explique le défenseur des consommateurs, qui attend les conclusions d’une enquête de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (Anses), en juin ou juillet, sur le cumul des ondes électromagnétiques développées par Linky.
Possibilité de facturer l’électricité à l’heure
« Les conclusions sur la dangerosité ou non de ces ondes seront déterminantes, en raison des problématiques juridiques que ça pose », précise Guy Grandirard.
L’association de consommateurs dénonce également les possibilités offertes aux fournisseurs d’énergie par cette nouvelle technologie. « Ils pourront couper le courant à distance, en appuyant sur un simple bouton. Et avec ce système, ils pourront mettre en place des tarifications en fonction des heures de consommation ! » proteste le président de l’ADC 54.
La seule solution offerte aux consommateurs sera de faire jouer la concurrence entre fournisseurs. Plus de 9.000 compteurs ont déjà été posés dans l’agglomération. La campagne d’installation va encore durer un an et demi.
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