L'engouement autour de la série met en lumière son succès, mais aussi la pression sociale que la format peut exercer sur ceux qui ne la regardent pas.
L'engouement autour de la série met en lumière son succès, mais aussi la pression sociale que la format peut exercer sur ceux qui ne la regardent pas.Je n'ai jamais regardé Game of Thrones. J'ignore qui est Jon Snow, s'il est mort ou vivant, mais également tout ce qui pousse autant de royaumes à se battre pour le même trône. Et pourtant, à force de vous voir phagocyter les conversations, au travail ou lors de soirées entre amis, j'ai parfois l'étrange sentiment d'en connaître moi-même les moindres détails.N'ayez crainte, cet article ne contient absolument aucun spoiler. Mais vraiment aucun.
Lundi 25 avril, lors du retour de Game of Thrones pour une sixième saison (c'est la dernière, rassurez-moi?), je me suis retrouvé piégé dans votre tourbillon de live-tweets, de photos de groupe sur Instagram, d'extraits de génériques partagés sur Snapchat ou de commentaires sur Facebook. La semaine suivante, rebelote. Après la diffusion du second épisode, près de 100.000 tweets (oui, vous avez bien lu) floqués du hashtag#GameofThrones et avec la mention «Jon Snow» ont été recensés. Après le coup de la saison passée, je crains déjà le final.
Soyons clairs, je n'ai jamais rien demandé de tout cela. Vous, fans et fidèles de Game of Thrones, ne le faites peut-être pas exprès, mais on n'entend que vous. En observant, impuissant, vos discussions quotidiennes sur l'intrigue de la série –comme c'était déjà le cas lors de la diffusion des précédentes saisons de Game of Thrones ou du dernier volet de la saga Star Wars que je ne n'ai jamais regardé–, je me suis alors demandé si j'étais tout seul dans cette situation. Est-ce que je n'exagèrerais pas un peu?
Visiblement, non.
Est-ce qu’on a le droit de n’avoir strictement rien à faire de #GoT ou pas. Je me sens exclue de votre délire, chaque année, c’est pareil.— Amandine Rebourg (@Amandiine) 2 mai 2016
Heureusement, il existe des dizaines, voire des centaines d'autres séries qui valent le détour. J'en suis moi-même un grand amateur. Je n'ai juste jamais été intéressé par l'imaginaire de Game of Thrones. Alors la pression que vous m'infligez, au travail comme lors de soirées entre amis, me fatigue et m'interroge. Comment dois-je réagir lorsqu'on me somme de regarder cette série, alors que je n'ai ni le temps, ni l'envie de le faire? Mélissa Thériault, professeure au département de philosophie et des arts de l'université du Québec à Trois-Rivières et auteure d'un article sur la dimension philosophique des séries télévisées, m'a rassuré:
«En quoi devrait-on être obligé à quoi que ce soit en matière de culture? Et de quel droit notre entourage se permet-il de juger de ce que l’on inclut ou non à notre agenda? S’il vous exclut parce que vous n’aimez pas la série, alors fuyez, c'est qu'ils ne sont pas vos amis!»La pression sociale d'une série
Par leurs discussions en face-à-face ou leurs échanges en ligne, les fans de séries –en l'occurence de Game of Thrones– exerceraient-ils une forme de pression sociale sur ceux qui regardent pas ces programmes? Clément Combes, docteur en sociologie et auteur d'une thèse sur les amateurs de séries télévisées, résume:
«Les séries comme Game of Thrones sont très populaires et s'imposent dans les médias et les conversations. À tel point qu'il en devient “difficile”, toute proportion gardée, de passer à côté. Donc, de fait, de même que l'hypermédiatisation du football pèse sur les indifférents et allergiques à ce sport, la surmédiatisation deGame of Thrones pèse sur ceux qui ne la suivent pas.»En quoi devrait-on être obligé à quoi que ce soit en matière de culture?Dans les entretiens qu'il a mené pour sa thèse, il a remarqué qu'une partie des personnes interrogées affirmait même céder et regarder des séries «avant tout pour pouvoir prendre part aux échanges» et aux conversations, comme ici ou là. Un cas de figure également observé dans des couples ou dans des familles, sans que cela soit forcément mal vécu par ces derniers, précise-t-il.
Mélissa Thériault, professeure au département de philosophie et des arts de l'université du Québec.
Mélissa Thériault, elle, reconnaît également s'être interrogée sur tout le boucan qui entoure le retour de la série Game of Thrones: «Je me suis demandé si je devais accepter de la regarder ou alors si je n'étais simplement pas assez cool.» Elle n'écarte pas non plus l'idée d'une pression sociale imposée par les fans de Game of Thones ou d'autres séries à succès. La professeure note qu'il arrive que certaines personnes cèdent et succombent parfois à la pression inconsciente de leur entourage afin de ne pas se retrouver largué ou mis de côté.
«Plutôt que de s'affirmer, certaines personnes s'en remettent à ce qu'on leur propose. Cela leur procure une devanture derrière laquelle se cacher. Être “dans le coup” donne une légitimité instantanée, mais qui est à renouveler constamment.»Pour finir de m'inquiéter sur le sort de vos proches, j'ai recueilli l'avis d'un autre expert en la matière, Victor Wiard, doctorant en communication à l'université libre de Bruxelles et auteur d'une enquête sur la manière dont les jeunes Belges consomment les séries sur internet.
Lui aussi estime que l'engouement autour de programmes populaires peut, dans certains cas, peser sur ceux qui ne les regardent pas. «Beaucoup de jeunes commencent à regarder une série particulière en entendant leurs amis en parler lors d'une conversation, parce que si tu ne l'as pas regardée, alors “tu ne peux pas comprendre”», ajoute-t-il.
Les bienfaits d'une série
En quelques années, principalement grâce à internet et à l'amélioration considérable des productions, les séries ont bouleversé nos habitudes télévisuelles et redéfini certains standards de notre consommation culturelle. Désormais, on binge-watche, on enchaîne les saisons et les épisodes à une vitesse inouïe, parfois même jusqu'à l'écœurement. Que celui qui n'a jamais passé une grande partie de son week-end bloqué devant sa série préférée me jette la première pierre.
En clair, depuis que les séries sont parvenues à conquérir un large public, la télévision a perdu son titre de «maîtresse des horloges». Un retournement qui a ses effets négatifs, comme la pression sociale indéniable que l'on vient d'évoquer, et d'autres, plus bénéfiques pour les individus, ajoute Mélissa Thériault.
Les séries sont un moyen d'entrer en relation avec autrui et d'engager une conversation sans risque de polémiqueÀ ses yeux, les séries comme Game of Thrones peuvent aussi nous permettre, dans une certaine mesure, de réfléchir à nos valeurs, de nous projeter dans des situations fictives et de nous aider à prendre les bonnes décisions. En ce sens, elles peuvent jouer un rôle important dans la vie individuelle et sociale.
«Les séries sont un moyen d'entrer en relation avec autrui et d'engager une conversation sans risque de polémique. Cela explique que, souvent, nos conversations se limitent à des sujets moins épineux que la politique ou la religion. Échanger sur un sujet “neutre” comme les séries permet d’établir une relation avec l’autre sans entrer, par exemple, dans sa vie personnelle. Le “small talk” joue un rôle plus important qu'il n'y paraît dans les rapports humains.»À la fois oppressantes et libératrices, les séries déclenchent et alimentent les interactions sociales. Je me souviens, par exemple, d'avoir moi-même vécu ce besoin de partage, de dialogue, d'analyser collectivement certains moments de la série pendant la diffusion de la deuxième saison de The Leftovers, en particulier après l'incroyable épisode 8(«International Assassin»).
À bien y réfléchir, je me souviens aussi avoir été quelque peu insistant, comme vous avecGame of Thrones, lorsque je tentais de convaincre mon entourage, mes amis ou mes collègues de regarder cette série «qui allait changer leur vie». Je le reconnais volontiers: je ne suis pas exempt de tout reproche et j'ai probablement autant que vous ma part de responsabilité dans la pression sociale que je viens d'évoquer.
Alors, maintenant que nous savons l'embarras, la pression et l'inconfort que notre attachement à une série peut provoquer chez ceux qui n'y prêtent guère attention, tâchons de le canaliser. Vous verrez, cela profitera à tout le monde, vous et moi y compris.
Avis Pimpf : Je peux comprendre son "agacement" à être "harcelé" ( il faut oublier "harassé" , ça fait anglicisme inutile la... [NB: je reviens un peu harasser est bien aussi un verbe français mais n'est pas des plus utilisé dans le langage courant, alors que "harassment" en anglais est plus fréquent... malheureusement...] un peu comme la sur-utilisation de "support" au lieu de soutien. Bref dit pépin...)
Oui Game of Thrones est une série qui cartonne, oui ça l'agace peut être d'entendre ses collègues en parler mais s'ils aiment cela en quoi veut il les en empêcher de parler.? moi si je n'aime pas quelque chose ou un style d’émission ou de musique c'est pas parce-que mes contacts aiment ça que je vais obligatoirement aimer.
Je n'aime pas le foot ( je n'en suis pas un grand on va dire), pourtant une bonne partie de ma famille et de mes amis sont des footeux, et combien de personnes au boulot parlent des résultats de foot , de rugby de façon passionné parce-qu’ils aiment tel ou tel équipe. Est ce que ça doit m'obliger à rentrer dans le lot ? non... de même ne jurent que par les émissions type Koh Lanta , Survivor et autre du genre, qui m'oblige à regarder et à "devoir supporter leur commentaires" personne, les autres ont le droit d'avoir leurs goûts et moi les miens.
Je peux comprendre qu'il soit un peu dépassé et qu'il trouve que cela en fait trop , dans le même genre je me souviens de l'émission de télé réalité Loft Story , c'était le truc à voir et à suivre qui moi dès l'époque me gavait , j'ai du voir par curiosité deux épisodes et ça m'a vite gonflé, parce-que ça ne correspond pas à ce que je veux voir à la tv...
bref je comprends son "agacement" mais en même temps quand on est face à des gens qui sont passionnés par un sujet que ce soit série, sport, autre activité et que tu ne partages pas le même engouement qu'eux dans la vie comment il fait ? il ne veut que côtoyer des gens qui partagent les mêmes goûts que lui ( ça s'appelle une secte pour moi ce genre d'approche...) il faut aussi accepter que les autres aiment autre chose mais aussi se faire suffisamment entendre et clair sur le fait qu'on adhère pas plus à cette passion que d'autres peuvent partager ( ah oui le sentiment de ne pas être inclus dans ce trip, c'est peut être mon coté loup solitaire, même si je vis une passion je la vis à ma manière et comme il me plait de la vivre , pourquoi il n'y aurait qu'une seule manière d'agir et de penser au sein d'une même passion, pour avoir géré des associations de fan/ passionné , on s'aperçoit vite que même si on peut partager des goûts communs pour des mêmes sujets, chacun le vit à sa manière on n'est pas que des robots ou des clones à vivre tous les choses de la même manière.... bref...)
c'est un peu mon contre coup de gueule à cet article, sans aucune méchanceté du moins à mon sens.... faut arrêter de vouloir "être dans la mode " et se faire ses propres choix dans la vie et aussi prendre en compte que chacun fait les siens et chacun a ses goûts , ça me semble simple pourtant? Et les séries ne sont pas un phénomène récent, quand on prend l'engouement pour des séries TV tel que Dallas dans les années 80 ou autre la fan base était déjà la ( la news sur la mort de JR je m'en souviens encore...), ça a juste pris de l'ampleur vu le nombre de chaines et de séries diffusées, mais ce phénomène n'a rien de nouveau...
bonne soirée....
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