lundi 11 avril 2016

20160411 - News : Faut-il prendre au sérieux la "liste noire des aliments" ?

Faut-il prendre au sérieux la "liste noire des aliments" ?





Faut-il prendre au sérieux la "liste noire des aliments" ?

Un livre qui paraît jeudi dresse une liste de 107 produits alimentaires à bannir de son chariot de supermarché. 

Faire ses courses relève parfois du casse-tête. Et la "liste noire des aliments", établie par un groupe de diététiciens et de journalistes, risque d'encore compliquer les choses. Selon les résultats de cette enquête, publiée jeudi dans Le guide du bon choix au supermarché (édition Thierry Souccar), pas moins de 323 aliments seraient à "éviter" et 107 carrément à "bannir", en raison de leur forte teneur en colorants, émulsifiants, conservateurs et autres additifs chimiques et controversés. Alors faut-il prendre cette liste au sérieux ? Décryptage.

Quels sont les aliments à éviter ? Des tagliatelles à la carbonara "Marque repère" à la soupe moulinée 9 légumes "Sveltesse" de "Maggi" en passant par les "Danio de Danone"… La liste épingle tout type de produits, et tout type de marques. Les résultats varient également pour les produits d'une même marque. L'étude montre par exemple que l'on trouve le pire comme le meilleur dans les "pastas box" (boîtes de pâtes) : ainsi chez Sodebo, celles aux fromages italiens sont bien notées alors que les ricotta-épinards sont le bonnet d'âne de ce classement.

L'étude épingle aussi beaucoup de produits "sans" : "sans" matière grasse (les Taillefine 0% par exemple), "sans" sucre ajouté (les galettes de riz au chocolat noir de Gerblé par exemple) ou même…"sans gluten", des produits pourtant très en vogue et considérés comme sains. En réalité, la raison est simple : pour compenser ce qu'il y a en moins dans ces produits et pour qu'ils ne perdent pas trop de goût, les marques rajoutent souvent des "horreurs", dixit Thierry Souccar, l'un des auteurs de ce guide. Pour le gluten, par exemple, "On remplace la farine de blé et il faut donner l'illusion que l'on a à peu près le même goût en bouche, que l'on a à peu près le même aspect, donc on met des graisses qui sont souvent de mauvaise qualité, on met des émulsifiants et au final c'est un produit complètement éloigné de l'idéal nutritionnel que l'on recherche".

Y a-t-il vraiment des composants à risque dans ces produits ?  Les produits "à bannir" sont épinglés par les auteurs à cause de leur forte teneur en additifs et en graisse dites "mauvaises". On trouve ainsi des colorants (le jaune de quinoléine (E104), l'azorubine ou carmoisine (E122), l'amarante (E123), le rouge ponceau 4R/le rouge cochenille (E124), l'erythrosine (E127), le rouge allura AC (E129)), des émulsifiants (des polysorbates et autres acides gras), des conservateurs (nitrate et nitrite de sodium, parabènes, hexaméthylènetétramine etc.) ou encore des additifs au phosphate, tous plus ou moins soupçonnés d'avoir des effets néfastes sur la santé. Parmi les risques, citons pêle-mêle : la favorisation des allergies, un potentiel cancérogène à forte dose, voire même le développement d'une hyperactivité chez les enfants.

Contactés par Europe 1, les dirigeants de l'Association nationale des industries argumentaires (Ania) préfèrent ne pas prendre position avant d'avoir lu le livre. Mais de manière générale, l'Association regrette "la cacophonie nutritionnelle, le 'food bashing' du moment". "On essaie de faire peur aux gens, cela fait vendre du papier. Nous serons attentifs au débat. Il sera intéressant d'entendre le point de vue de tous les nutritionnistes", nous explique-t-on encore.

Dans quelle mesure faut-il s'inquiéter ? En réalité, les risques autour des additifs existent bel et bien, et plusieurs des composants cités plus haut ont même été interdits dans certains pays européens, voire aux Etats-Unis. Mais il ne faut pas non plus s'alarmer si vous ou vos enfants avez déjà mangé l'un de ces produits, ni forcément les jeter à la poubelle.

"Consommés en petites quantités, aucun de ces produits n'est vraiment dangereux", explique à Europe 1 le nutritionniste Patrick Serog. "Même sur la question de savoir s'ils sont sains ou non, on manque de recul, d'études scientifiques à long terme. Si tous ces composants au nom qui fait peur sont commercialisés en France, c'est que l'on ne sait pas encore grand-chose sur eux. En général, dès que l'on a la preuve qu'un produit est vraiment néfaste, qu'il provoque une allergie par exemple, il est retiré de la vente", poursuit le scientifique. Qui conclut : "la règle, ce doit être de varier son alimentation. Pour un goûter, on peut manger quelques biscuits avec des additifs une ou deux fois dans la semaine, puis varier avec des fruits, du pain et du chocolat les autres jours".

Le nutritionniste partage également les quelques conseils de bons sens donnés par l'ouvrage. Les voici :

  • Entre deux produits industriels, mieux vaut toujours choisir celui qui a la liste d'ingrédients la plus courte. En d'autres termes, boycottez autant que possible les additifs et les sucres ajoutés, même si un petit plaisir de temps en temps ne vous tuera pas.
  • Dans cette liste, préférez également les produits contenant des ingrédients que l'on peut trouver dans son placard, c'est à dire de la farine et du sucre, plutôt que de l'amidon modifié et du sirop de glucose.
  • Préférez les corps gras de "qualité" : huiles végétales en l'état, beurre, crème et graisse d'oie. 

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